Dans un arrêt du 25 octobre 2011 (aff. C-509/09), la Cour de Justice avait précisé que la victime d’actes illicites pouvait saisir le tribunal de son domicile pour demander réparation de l’intégralité de son dommage (voir ). Cette décision, qui apporte une avancée significative dans la protection juridictionnelle des victimes en leur facilitant l’accès à la justice, posait la question de sa portée. En l’occurrence, on peut se demander si ce principe est applicable en matière de contrefaçon présumée de marques. Dans un arrêt du 19 avril 2012 (), la Cour de Justice répond partiellement à cette question. Le litige portait sur l’achat par un concurrent, auprès de Google, d’un mot clé correspondant à la marque du titulaire afin que l’annonce publicitaire du concurrent s’affiche lorsqu’un internaute effectue une recherche sur Google sur la base de la marque concernée. L’annonce étant affichée sur Google.de (site allemand de Google), le titulaire de la marque (marque nationale autrichienne) y voyait une atteinte à ses droits qu’il décida de poursuivre devant les juridictions autrichiennes (de son siège social), qui interrogèrent la Cour de Justice sur la détermination de leur compétence au regard du Règlement 44/2001 sur la compétence judiciaire. Dans ses réponses, la Cour rappelle que la protection conférée par une marque nationale est limitée au territoire national concerné. Cette territorialité de la marque appelle, selon la Cour, à considérer que le lieu de matérialisation du dommage à une marque nationale est le territoire de l’Etat membre dans lequel la marque concernée est enregistrée. Les juridictions de cet Etat membre sont, selon la Cour, les mieux placées (y compris sur le plan de la prévisibilité de la compétence) pour apprécier l’atteinte éventuelle et statuer sur la réparation de l’intégralité du préjudice. La compétence des juridictions du domicile du titulaire est écartée par la Cour, en raison du principe de territorialité des marques nationales. La question n’étant pas posée en l’espèce, la Cour ne donne pas d’indication sur la manière d’appliquer son raisonnement pour les marques communautaires (enregistrées pour l’ensemble du territoire de l’Union). En ce qui concerne le second critère du Règlement 44/2001, à savoir le lieu de l’événement causal (lieu de la faute), la Cour précise que le comportement litigieux est celui de l’annonceur lorsqu’il décide d’acquérir un mot clé déterminé dans le cadre de sa communication commerciale. Pour des raisons de prévisibilité de la compétence, les lieux de localisation des serveurs (de l’annonceur ou du prestataire de services de référencement payant) ne peuvent être retenus et doivent être écartés au profit du lieu d’établissement de l’annonceur. La Cour en conclut donc que le demandeur a le choix d’introduire sa procédure devant les juridictions de l’Etat membre où la marque est enregistrée ou de l’Etat membre d’établissement de l’annonceur. Notre conseil : Compte tenu de la position adoptée par la Cour, il n’est plus indiqué d’introduire une action devant les juridictions de l’Etat membre d’établissement du titulaire de marque nationale si la marque litigieuse n’y est pas enregistrée. En l’absence de réponse claire pour ce qui concerne les titulaires de marques communautaires, la stratégie judiciaire doit être évaluée minutieusement en fonction des critères susceptibles de fonder la compétence internationale.”