Le « DMA » ou « Digital Markets Act » est la « Législation sur les marchés numériques ».
De quoi s’agit-il ? Quelles en sont les conséquences ?
Nous vous expliquons tout en termes simples ci-dessous.
1. Le DMA, c’est quoi ?
Dans son nom complet et technique, on parle du Règlement 2022/1925 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique.
Le DMA a été publié le 12 octobre 2022 et entrera progressivement en vigueur.
Le DMA vise à garantir un niveau de concurrence plus élevé sur les marchés numériques européens. Il est destiné à réguler le comportement des plus grandes entreprises du numérique – appelées « contrôleur d’accès » (ou « Gatekeeper » en anglais).
Le DMA interdit aux Gatekeepers de déployer un certain nombre de pratiques commerciales qui empêcheraient de nouvelles entreprises d’entrer sur le marché.
2. Quel est l’objectif du DMA ?
Les GAFAM (Google, Amazon, Meta), et quelques grandes plateformes en ligne servent d’intermédiaires dans la plupart des transactions entre les utilisateurs finaux et les utilisateurs professionnels. De nombreux utilisateurs professionnels dépendent de ces contrôleurs d’accès.
Dans ce contexte, l’objectif de la Législation sur les marchés numériques est de créer les conditions d’une concurrence accrue qui devra permettre aux consommateurs de disposer d’un plus grand choix de services.
3. Quelles entreprises seront considérées comme des gatekeepers (contrôleurs d’accès) soumises au DMA ?
Une entreprise est un « contrôleur d’accès » soumis au DMA si elle remplit deux conditions :
- elle fournit un « service de plateforme de base » ;
- et, elle a atteint une certaine taille.
Le contrôleur d’accès sera alors soumis au contrôle de la Commission, et risque d’être sanctionné s’il déploie certains comportements.
3.1 Qu’est-ce qu’un « service de plateforme de base » ?
Le DMA identifie huit types de « services de plateforme de base ». Il s’agit :
- des services d’intermédiation en ligne (tels que par exemple, les places de marché (Amazon, eBay, etc.) les magasins d’applications logicielles), les applications de l’économie collaborative, etc,
- des moteurs de recherche en ligne,
- des réseaux sociaux,
- des services de plateformes de partage de vidéos,
- des services de communication électronique interpersonnelle indépendants du numéro,
- des navigateurs en ligne ;
- des assistants virtuels ;
- des systèmes d’exploitation,
- des services en nuage, et
- des services de publicité en ligne (y compris les réseaux publicitaires, les échanges publicitaires et tout autre service d’intermédiation publicitaire fournis par une plateforme).
3.2 A partir de quelle taille le fournisseur d’un service de plateforme de base est-il un « Gatekeeper » ?
Un fournisseur de services de plateforme de base peut se voir affubler du statut de contrôleur d’accès si :
- Il a un impact significatif sur le marché intérieur européen – ce qui sera présumé au regard du chiffre d’affaires réalisé. On parle ici :
- d’un chiffre d’affaires annuel d’au moins 7,5 milliards d’euros ; ou,
- d’une capitalisation boursière moyenne d’au moins 75 milliards d’euros ; et,
- d’une présence dans au moins trois États membres.
- Elle exploite un service de plateforme de base qui sert de passerelle importante permettant aux utilisateurs professionnels d’atteindre les utilisateurs finaux. Cette condition serait présumée remplie si l’entreprise rassemble :
- plus de 45 millions d’utilisateurs finaux actifs mensuels établis ou situés dans l’Union, et
- plus de 10.000 utilisateurs professionnels actifs annuels établis dans l’Union au cours du dernier exercice financier.
- Elle jouit d’une position bien établie et durable.
- Les seuils précités doivent, selon les cas être rencontrés de manière stable (durant 3 ans).
3.3. Les contrôleurs d’accès sont soumis au contrôle de la Commission européenne, grâce au DMA
Il appartiendra aux entreprises de prendre l’initiative de déclarer à la Commission européenne de déclarer qu’elles rencontrent ces seuils, laquelle en vérifiera la réalité.
Selon les seuils retenus, le DMA ne concernera dans les faits que les GAFAM américaines, ou d’autres. Les entreprises européennes Zalando, Booking.com et DeliveryHero ont exprimé leurs préoccupations d’être potentiellement visées par le DMA.
4. Quelles conséquences sur le comportement des contrôleurs d’accès ?
Les « Gatekeepers » devront se conformer à certaines obligations.
Notamment, dans le cadre du projet initial de DMA, les Gatekeepers devront :
- Obtenir le consentement des utilisateurs pour combiner les données personnelles de leur service de plateforme de base avec des données personnelles ;
- Interdire les clauses de parités interplateformes: ou, pour le dire autrement, devront autoriser les entreprises utilisatrices à pratiquer d’autres prix sur d’autres plateformes, pour un même service ;
- S’abstenir de jumeler un service central avec un autre, accessoire. (A titre d’illustration, le fournisseur d’une boutique d’applications ne pourra pas subordonner l’accès au service à l’utilisation de son moteur de recherche. Cette interdiction s’applique uniquement aux obligations d’enregistrement ou d’abonnement. Cela laissera de côté l’intégration de produits comme la vente liée d’un magasin d’applications et d’un système d’exploitation) ;
- Autoriser la modification des choix par défauts – le DMA interdit les limitations à la capacité des utilisateurs finaux de modifier les choix par défaut des Gatekeepers ;
- Permettre la portabilité des données de leur service, vers un service concurrent – ainsi que fournir les outils appropriés à cette fin ;
- Fournir un accès “FRAND” (i.e.: à des conditions équitables, raisonnables et non-discriminatoires) pour :
- l’accès aux données de classement (requêtes, clics, vues) des moteurs de recherche en ligne ;
- l’accès aux boutiques d’application logicielles ;
- Ne pas faire d’auto-préférence (self-preferecing) – soit traiter les services et les produits offerts par le gardien plus favorablement dans le classement que les services ou produits similaires offerts par des tiers sur la plateforme ;
- Fournir des informations sur les tarifs publicitaires pratiqués aux deux bouts de la chaîne d’annonces.
La liste complète de ces obligations spéciales est reprise aux articles 5 et 6 du DMA.
5. Quelles conséquences en cas de non-exécution ?
La Commission a décidé de sortir l’artillerie lourde.
- En cas d’infraction, des amendes équivalent à 10% du chiffre d’affaires de l’entreprise considérée pourront être imposées.
- En cas de récidives, des obligations prévues par le DMA, la Commission européenne pourrait imposer des amendes pouvant aller jusqu’à 20 % du chiffre d’affaires total.
- Des astreintes journalières en cas de non-exécution sont également prévues.
Vu la taille de ces entreprises, les amendes pourraient donner lieu à des montants proprement vertigineux.
Notre conseil :
L’entrée en vigueur du DMA soulève de nombreuses questions.
Tant pour les contrôleurs d’accès que pour les usagers de ces plateformes.
Pour tout connaître des éventuelles contraintes qui en résultent, ou des opportunités qu’il offre, n’hésitez pas à nous contacter !