Le Règlement Général sur la Protection des Données (ci-après « RGPD ») est entré en application depuis un peu plus de deux ans déjà.
En tant qu’entreprise, vous traitez des données à caractère personnel au quotidien (clients, fournisseurs, sous-traitants…). Vous avez probablement investi du temps et de l’argent pour vous y conformer.
Néanmoins, il se peut qu’un de vos concurrents, moins sensibilisé que vous au respect des données de ses clients, agisse en méconnaissant ce principe et en tire des avantages sur le plan commercial.
Comment pouvez-vous réagir face à cela ?
L’arrêt (déjà ancien) du 15 février 2005 prononcé par la Cour d’appel de Bruxelles apporte une réponse. Même s’il est antérieur au RGPD, les principes dégagés demeurent applicables.
Faits
Le litige à l’origine de l’action en justice implique trois acteurs : d’une part une banque, et d’autre part deux fédérations d’intermédiaires en assurance.
La banque, qui a constaté de mauvais chiffres dans deux agences, a réalisé une enquête afin d’en déterminer les causes. Il ressort de cette enquête que ces agents, malgré leur obligation contractuelle d’exclusivité, ont vendu des produits concurrents à des clients. Il a été immédiatement mis fin aux contrats de ces agents.
Non-respect du droit à la protection des données à caractère personnel …
Lors de son enquête, la banque a utilisé les données personnelles de ses clients, pour un but dont les clients n’avaient pas été informés. En effet, pour découvrir que ses agents ont vendu des produits concurrents à des clients, la banque a investigué les comptes de ses clients. Plus précisément, la banque a analysé leurs relevés bancaires pour identifier les clients dont les comptes présentaient une diminution de capitaux inhabituelle.
Or, tout traitement de donnés à caractère personnel doit répondre à une finalité expressément définie et justifiée. Les personnes dont les données sont traitées doivent en être informées préalablement.
Les clients n’avaient pas été informés par la banque de l’utilisation de leurs relevés de compte pour cette finalité. Ils ne pouvaient pas non plus raisonnablement s’attendre à ce que leur données soient utilisées dans le but de contrôler les intermédiaires d’assurance.
La Cour, saisie par les fédérations d’intermédiaires en assurance, conclut donc que la banque s’est rendue coupable d’une violation de la loi belge qui précédait le RGPD.
= pratique commerciale déloyale
Cette décision est particulièrement intéressante dans un contexte B2B. Il ne s’agit pas d’une plainte d’une personne concernée, mais bien d’une action intentée par une autre entreprise envers un responsable du traitement qui ne respecte pas la protection des données.
Or, après avoir constaté la violation de la loi protégeant les données à caractère personnel, la Cour en conclut que l’institution bancaire est coupable d’une pratique commerciale déloyale.
En effet, est interdit tout acte contraire aux pratiques loyales du marché par lequel une entreprise porte atteinte ou peut porter atteinte aux intérêts professionnels d’une ou de plusieurs autres entreprises (article VI 104 du Code de droit économique).
Or, enfreindre une disposition légale dans l’exercice de ses activités économiques, qui affecte les intérêts professionnels de concurrents, constitue une pratique déloyale.
Conséquences ?
Une entreprise peut agir (devant le Président du Tribunal de l’entreprise) pour demander qu’un de ses concurrents cesse une telle pratique, dès lors qu’elle porte atteinte à ses intérêts professionnels. L’entreprise qui sollicite la cessation veillera à demander que l’ordre de cessation soit assorti d’astreintes.
En outre, la violation de la loi constituant souvent une faute, l’entreprise qui est victime d’une violation des règles du RGPD pourra demander un dédommagement de son éventuel préjudice.
Ons advies:
Si un de vos concurrents ne respecte pas le RGPD et que ce comportement vous porte préjudice, il peut se voir reprocher la commission d’une pratique commerciale déloyale.
Dans ce cas, il est possible d’agir en cessation à son encontre, afin de mettre un terme à cette pratique.
Notre équipe de spécialistes est bien-entendu à votre disposition pour vous aider à évaluer l’opportunité d’une telle action.