Qui n’a pas encore été convié à passer dans le dernier « concept- » ou « pop-up store » ouvert en centre-ville par cet ami branché ou cette publicité aguichante ?
Lieux des dernières tendances ou innovations, les concept– et pop-up stores sont devenus incontournables pour tout bon consommateur dans le vent qui se respecte.
Concept– et pop-up stores, tendances des consommateurs et de l’entreprenariat : « It’s a match !“
Cette récente approche marketing est basée sur l’ouverture d’un point de vente au sens traditionnel, mais de manière temporaire. Celle-ci embrasse les récentes évolutions des tendances tant des consommateurs que de l’entreprenariat.
Ainsi :
- Les consommateurs à la recherche de découverte et des nouvelles tendances sont ravis de pousser les portes de ces magasins dont le caractère éphémère garantit une certaine exception, l’exclusivité.
- Les entrepreneurs plus ou moins aguerris, à la recherche de garantie sont rassurés. En effet, ils ont la possibilité de procéder à une étude de marché, tester un nouveau concept et sa viabilité. Ils pourront ensuite l’adapter le cas échéant, avant de passer à un investissement durable… ou d’apprendre de leur expérience et abandonner ce projet au profit d’un autre.
- Les entrepreneurs désireux de se faire (davantage) connaître du public ou de se faire une réputation ont l’opportunité de se présenter aux citadins et éventuellement attirer ceux-ci à l’établissement d’origine.
Concept– et pop-up stores en Région Wallonne
Un constat s’impose depuis quelques années en Région Wallonne :
- De plus en plus, les entrepreneurs sont réticents à conclure un bail commercial pour une durée minimum de 9 ans.
- De plus en plus d’immeubles à vocation commerciale sont vides dans les centres-villes.
- Intérêt de ces concept– et pop-up stores pour l’économie et la dynamique des centres-villes.
Concept– et pop-up stores, quelle qualification juridique ?
Mais, comment qualifier juridiquement les conventions conclues pour la location d’un bien accueillant ces concept– et pop-up stores ?
Concept– et pop-up stores, baux commerciaux (avec clause d’essai) ?
Tout d’abord, la convention relative aux concept– et pop-up stores pouvait-elle être qualifiée de bail commercial (avec clause d’essai) ? La qualification de bail commercial implique notamment que la convention soit conclue pour une durée minimale de neuf ans. Cette exigence est incompatible avec l’éphémérité des concept– et pop-up stores. Aurait-on alors pu envisager de contourner cette exigence en insérant une clause d’essai d’une durée inférieure ? La loi l’exclut expressément. Le bail commercial ne peut être conclu pour une durée inférieure à neuf ans. La qualification de bail commercial ne peut donc être retenue.
Concept– et pop-up stores, baux de circonstances ?
Ensuite, la qualification de bail de circonstances aurait-elle pu être retenue ? Cette deuxième qualification vise la convention portant sur la location d’un immeuble (ou une partie d’immeuble), conclue en considération de circonstances temporaires particulières. Celles-ci constituent la cause première de la convention.
Pour apprécier le caractère temporaire de la location, il convient d’avoir égard :
- À la nature du bien loué (usage de matériaux périssables, réalisation d’une construction temporaire …).
- À la destination du bien loué (bail conclu dans le cadre d’une foire ou une exposition, location d’un emplacement de parking en lien avec un événement précis et temporairement limité).
- Aux usages (location liée aux saisons touristiques)
Cette catégorie spécifique de bail échappe aux dispositions de la loi sur le bail commercial. Elle est dès lors régie par le droit commun.
Toutefois, les caractéristiques des concept– et pop-up stores ne correspondent pas aux « circonstances temporaires particulières » requises pour les baux de circonstances. Par conséquent, ces contrats n’échappent pas aux dispositions de la loi sur le bail commercial.
Concept– et pop-up stores, conventions d’occupation à titre précaire ?
Enfin, aurait-on pu analyser les conventions de location de biens accueillant des concept– et pop-up stores de conventions d’occupation à titre précaire ?
Ce type de convention se distingue du bail en ce qu’il conserve au propriétaire du bien le droit de disposer à tout moment de la chosé louée.
La convention d’occupation à titre précaire est licite pour autant que :
- La convention ait été conclue sans fraude.
- La précarité du droit d’occupation par le preneur ait une justification objective (par exemple : le bailleur tolère que les locataires restent dans les lieux loués après l’expiration de la durée du bail, mais uniquement dans le but de et le temps pour ceux-ci de trouver un autre bien à louer).
Toutefois, il ne suffit pas pour les parties de qualifier leur convention de convention d’occupation à titre précaire pour lui conférer cette qualité et, partant, échapper aux dispositions de la loi sur le bail commercial. La convention serait alors requalifiée en bail commercial. Et donc conclue pour une durée minimale de 9 ans.
Or, le caractère éphémère des concept– et pop-up stores ne remplit pas l’exigence de précarité ayant une justification objective. Celle-ci est pourtant nécessaire pour échapper à l’application des dispositions de la loi sur le bail commercial.
Ainsi, jusqu’il y a peu, le droit belge n’offrait pas de cadre légal permettant d’accueillir cette évolution sociétale. Dès lors, de plus en plus de locations et situations légalement non-encadrées existaient. Ce phénomène impliquait une grande insécurité juridique. Tant pour les propriétaires d’immeubles que pour les entrepreneurs cherchant à louer un emplacement pour exercer leur activité.
Concept– et pop-up stores, bail commercial de courte durée
Le législateur wallon a alors décidé de prendre la plume et dessiner un cadre légal à une pratique déjà bien établie, avec le Décret du 15 mars 2018 relatif au bail commercial de courte durée.
La loi prévoit, en Région wallonne, de conclure le bail pour une durée inférieure ou égale à un an. Ce régime est dérogatoire à celui du bail commercial « classique ». Dès lors, il convient de respecter strictement le cadre dessiné par le Décret wallon. En effet, au moindre dépassement, le contrat perdrait la qualification de bail commercial de courte durée. Celui-ci serait alors réputé initialement conclu pour une durée minimale de neuf ans.
Pour obtenir plus d’informations sur les démarches à entreprendre au lancement d’une activité commerciale, n’hésitez pas à consulter cet article.
Ons advies:
Le régime du bail commercial de courte durée étant un régime dérogatoire à celui, impératif, du bail commercial « classique », les conditions de son application sont interprétées strictement.
Il est alors très facile de retomber dans le régime du bail commercial « classique », avec toutes les obligations que celui-ci implique.
Il convient donc d’être prudent dans la rédaction et la conclusion d’un bail commercial de courte durée.
N’oublions pas qu'”un avocat c’est quelqu’un qu’il faut voir avant, pour éviter les ennuis après »…