Les hyperliens ! L’Internet en est parsemé. Ils renvoient très facilement un internaute vers du contenu hébergé sur d’autres sites. Cette technique n’est pourtant pas sans poser question, tant pour l’éditeur du lien hypertexte que pour l’internaute : quel est le risque si le site vers lequel renvoi l’hyperlien publie des œuvres protégées de manière illicite ?
Un « acte de communication au public » ?
Légalement, cette question revient à déterminer si le fait d’établir un lien hypertexte vers du contenu protégé constitue un acte dit « de communication au public », auquel cas l’autorisation préalable des titulaires de droit sur ce contenu est nécessaire.
Ne constitue pas un acte de communication au public et, partant, ne requiert pas l’autorisation préalable des titulaires de droit d’auteur le fait de « renvoyer, via des hyperliens, à des œuvres protégées disponibles en accès libre sur un autre site ». C’est du moins ce qu’avait déclaré la Cour de justice en 2014, sans toutefois se prononcer sur les conséquences de l’absence d’autorisation des titulaires de ces œuvres quant à leur publication sur cet autre site.
En 2016, la Cour de justice précise davantage les situations dans lesquelles le fait pour une personne d’insérer un hyperlien vers un site contenant des œuvres protégées doit être qualifié d’acte de communication au public :
- Soit la personne ignore que le site vers lequel renvoie son hyperlien publie les œuvres protégées sans avoir obtenu les autorisations des titulaires de droits d’auteur. Dans ce cas, et si la personne ne poursuit pas d’objectif lucratif, il n’y aura pas d’acte communication au public.
- Soit la personne, lorsqu’elle place l’hyperlien, poursuit un but lucratif. Dans ce cas, elle est tenue d’effectuer les vérifications nécessaires pour s’assurer que les œuvres sont publiées par ce site avec l’autorisation de leurs titulaires. Si tel n’était toutefois pas le cas, la personne serait présumée avoir agi en pleine connaissance de cause du caractère illégal d’une telle publication. À moins que la personne ne puisse renverser cette présomption, il faut alors considérer qu’il y a bien eu communication au public.
Vente d’un lecteur audiovisuel fournissant des hyperliens vers des œuvres protégées
La question dépasse même le cadre strict de renvoi d’un site internet à un autre. Que penser de la mise en vente d’un lecteur audiovisuel dans lequel sont installés des hyperliens donnant librement accès à des films, émissions et séries et ce, sans l’autorisation des ayants droit de ces œuvres ? Selon un arrêt de la Cour de justice rendu en 2017, la vente d’un tel lecteur constitue bien un acte de communication au public. En outre, l’utilisation de ce lecteur multimédia par son acquéreur pour accéder gratuitement à des œuvres protégées ne peut entrer dans le champ de l’exception de reproduction provisoire pour utilisation licite dès lors qu’elle porte atteinte à l’exploitation normale des œuvres concernées.
Notre conseil :
La création d’un hyperlien constitue une technique rapide et séduisante pour qui veut enrichir le contenu de son site web. Afin d’éviter toute contestation de la part du titulaire de droits sur ce contenu, veillez toutefois à vous assurer que le site cible de votre hyperlien ne publie pas ce contenu de manière illégale ou n’interdit pas un tel renvoi.