Si vous constatez que votre nom apparaît dans un article archivé en ligne relatant des faits judiciaires auxquels vous avez été impliqué(e), avez-vous le droit de demander l’anonymisation de cet article à l’éditeur de presse dont émane la publication ?
C’est à cette délicate question que la grande chambre de la Cour européenne des droits de l’homme apporte une réponse dans son arrêt prononcé dans l’affaire Hurbain c. Belgique.
Dans cette affaire, l’éditeur de presse avait rendu accessible en ligne l’archive électronique d’un article relatant un accident de la route mortel survenu en 1994 et indiquant le nom complet du conducteur responsable de l’accident. En 2010, le conducteur, qui avait alors purgé sa peine et qui avait bénéficié d’une réhabilitation, a demandé la suppression ou, à tout le moins, l’anonymisation de cette archive, en vain.
Dans le cadre de l’action en responsabilité civile qu’il a alors introduite à l’encontre de l’éditeur, les juridictions belges ont condamné l’éditeur à anonymiser l’archive litigieuse sur le fondement du « droit à l’oubli », qui fait partie intégrante du droit au respect de la vie privée (reconnu par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme).
Saisie d’une requête introduite par l’éditeur, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que l’atteinte portée à la liberté d’expression – et plus précisément à la liberté de presse – de l’éditeur était justifiée et ne violait donc pas l’article 10 de la Convention.
La décision de la Cour résulte d’un examen fondé sur sept critères :
- La nature de l’information ;
- Le temps écoulé depuis la survenance des faits, depuis la première publication de l’article et depuis la mise en ligne de celui-ci ;
- L’intérêt contemporain de l’information ;
- La notoriété de la personne qui entend bénéficier du droit à l’oubli et son comportement depuis la survenance des faits ;
- Les répercussions négatives résultant de la permanence de l’information en ligne (en l’espèce, les juridictions belges ont estimé le maintien en ligne de l’article litigieux en libre accès pendant une si longue durée était de nature à créer un « casier judiciaire virtuel» pour le conducteur, résultant en un préjudice grave dans le chef de celui-ci) ;
- Le degré d’accessibilité de l’information au sein des archives numériques ;
- L’impact de la mesure sur la liberté d’expression (et sur la liberté de presse, plus précisément).
Notre conseil :
Si vous souhaitez qu’un article archivé en ligne relatant des faits judiciaires auxquels vous avez été impliqué ne fasse plus mention de votre nom, l’opportunité d’en demander l’anonymisation à l’éditeur responsable devrait faire l’objet d’une évaluation sur base des critères dégagés par la Cour européenne des droits de l’homme.
N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez obtenir des informations complémentaires au sujet de la réalisation d’une telle évaluation.