Il y a deux semaines, les médias relayaient l’information communiquée par VTM Nieuws et confirmée auprès de Belga, selon laquelle la zone de police Carma dans le Limbourg déploierait des drones pendant la période des fêtes afin d’assurer le respect des mesures sanitaires et l’interdiction des feux d’artifice. Dans cet article, la règlementation qui encadre l’utilisation d’un drone par les forces de police va être brièvement développée.
Quelles sont les conditions d’utilisation d’un drone par les forces de police ?
Le cadre juridique encadrant l’utilisation de drones par les forces de police comprend plusieurs textes, le principal étant la loi sur la fonction de police.
La loi sur la fonction de police du 5 août 1992 encadre les cas d’utilisation de caméras mobiles, telles que celles qui se trouvent sur un drone. En outre, il existe une circulaire ministérielle du 25 juin 2019 réglant l’usage de drones par les services de police et de secours, qui aborde les exigences techniques pour les utiliser.
La loi sur la fonction de police
Cette loi prévoit les conditions dans lesquelles les services de police peuvent avoir recours à des caméras de manière visible. Une caméra d’un drone est réputé visible puisqu’il s’agit d’une caméra
d’aéronef de police, ou de tout autre moyen de transport de police, identifiables comme tels.
Les caméras mobiles ne peuvent être utilisées que dans certaines circonstances :
- dans les lieux ouverts et les lieux fermés dont les forces de police sont gestionnaires ;
- dans les lieux fermés accessibles au public, dont ils ne sont pas les gestionnaires et ce, uniquement pendant la durée d’une intervention ;
- dans les lieux fermés non accessibles au public, dont ils ne sont pas les gestionnaires et uniquement pendant la durée d’une intervention.
Par lieu ouvert, il faut entendre tout lieu non délimité par une enceinte et accessible librement au public, dont les voies publiques gérées par les autorités publiques gestionnaires de voiries ;
Par lieu fermé accessible au public, il faut entendre tout bâtiment ou lieu délimité par une enceinte, destiné à l’usage du public, où des services peuvent lui être fournis.
Enfin, un lieu fermé non accessible au public est tout bâtiment ou lieu délimité par une enceinte, destiné uniquement à l’usage des utilisateurs habituels.
En d’autres termes, votre propriété privée ne peut faire l’objet de surveillance par caméra par les services de police que lors d’une intervention policière. Cela limite normalement l’usage des drones pendant la période des fêtes aux interventions spécifiques sur base, par exemple, d’un flagrant délit, et non de manière préventive en « scannant » les maisons.
Cette loi précise également que les caméras ne peuvent fournir d’images qui portent atteinte à l’intimité d’une personne, ni viser à recueillir des informations relatives à l’origine raciale ou ethnique d’une personne, ses convictions religieuses ou philosophiques, ses opinions politiques, son appartenance à une organisation syndicale, son état de santé, sa vie sexuelle ou son orientation sexuelle.
L’utilisation de ces caméras mobiles est également soumise au respect des principes de proportionnalité et de subsidiarité.
Demande d’autorisation
Ces utilisations sont conditionnées à l’obtention d’une autorisation préalable de principe :
- du conseil communal, lorsqu’il s’agit d’une zone de police
- du ministre de l’Intérieur ou son délégué, pour les services de la police fédérale.
Obligations en matière de respect de la vie privée
Cette demande d’autorisation tient compte d’une analyse d’impact et de risques au niveau de la protection de la vie privée et au niveau opérationnel, notamment quant aux catégories de données à caractère personnel traitées, à la proportionnalité des moyens mis en œuvre, aux objectifs opérationnels à atteindre et à la durée de conservation des données nécessaire pour atteindre ces objectifs.
L’utilisation d’un drone qui aurait comme conséquence l’intrusion dans la vie privée ou le domicile des individus est donc susceptible de violer les dispositions suivantes : l’article 8 de la C.E.D.H., l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (UE) et l’article 22 de la Constitution, qui consacrent le droit de tout individu d’invoquer le respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance à l’égard de tout autre individu, mais également à l’égard des autorités publiques.
Position des procureurs généraux
La semaine dernière, les procureurs généraux ont limité l’utilisation des drones pendant la période des fêtes. Ils ont confirmé que « l’utilisation de drones à des fins judiciaires dans le cadre de l’arrêté ministériel du 28 octobre 2020, à savoir pour constater des infractions contre les mesures prises pour limiter la propagation du coronavirus, n’est pas proportionnelle à l’égard de la gravité des infractions à rechercher (les infractions à l’arrêté ministériel du 28/10/2020 sont punies d’un emprisonnement de 8 jours à 3 mois et d’une amende de 26 à 500 euros, ou d’une de ces peines seulement) et de la violation des libertés et droits individuels.
Par conséquent, les services de police ne peuvent pas utiliser de drones pour la recherche et la constatation d’infractions contre les mesures prises pour limiter la propagation du coronavirus. »
Le collège des procureurs généraux a néanmoins souligné que l’utilisation de drones et de caméras mobiles reste possible à des fins administratives, par exemple pour avoir une vue sur le nombre de personnes sur une digue de notre littoral ou dans des rues commerçantes afin de prendre d’éventuelles mesures de sécurité.
Notre conseil :
Passez de bonnes fêtes malgré tout !